Approche critique de la construction européenne - Journée d'étude du 12 mars 2005
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Un certain nombre de
professeurs de droit, opposés au traité établissant une Constitution pour
l’Europe, ont décidé de se réunir à l'Université Panthéon-Assas pour débattre
librement entre eux, et avec le public présent, de différentes questions
juridiques et politiques posées par ce texte sans clarté ni cohésion, sous la
responsabilité scientifique des Professeurs Olivier Gohin et Armel Pécheul.
Refuser d’autoriser la ratification du traité établissant une Constitution pour
l’Europe, c’est refuser de construire une Fédération européenne et vouloir, par
ce vote, donner un coup d’arrêt à la dérive de la construction politique de
notre continent sans frontières, selon un schéma juridique qui n’est pas en
mesure d’assurer la garantie des droits et de déterminer la séparation des
pouvoirs.
Ainsi, selon la Déclaration de 1789 que viendrait supplanter n’importe quelle
directive de Bruxelles, devenue loi-cadre européenne, la nouvelle Union
européenne n’aurait " point de Constitution " en ce sens qu’elle
aurait une mauvaise Constitution. Au demeurant, là où convient un Pacte
confédéral préservant la souveraineté des Nations, toute Constitution
Européenne est mauvaise en soi dans la mesure où elle est nécessairement
dirigée contre la liberté des États et l’égalité des peuples.
Voici le résumé des communications orales ou écrites qui ont été présentées et
le plan des Actes de cette Journée d’études qui seront prochainement publiés
aux Éditions François-Xavier de GUIBERT (bon de souscription ci-après). Sont
ainsi exposées quelques-unes des multiples et bonnes raisons de dire NON en
droit.
I. NOUVELLE UNION EUROPÉENNE ET CONSTITUTION
Séance sous la présidence du Professeur François-Guilhem BERTRAND
Le contrôle de constitutionnalité du traité établissant une Constitution
pour l’Europe : le double jeu du Conseil constitutionnel
par Frédéric ROUVILLOIS
Professeur à l’Université de Paris V
Résumé : La décision du Conseil constitutionnel du 19 novembre 2004 qui admet
la constitutionnalité du traité établissant une Constitution pour l’Europe
manifeste le double jeu du Conseil constitutionnel qui s'incline devant l'ordre
communautaire afin de ne pas fournir d'arguments supplémentaires aux partisans
du fédéralisme. De ce double jeu, on retrouve des indices probants sur ces
trois questions essentielles : la nature du traité, le problème de la primauté,
et la notion de laïcité.
La primauté constitutionnelle du droit de l’Union et l’abrogation implicite
de la Constitution française par Armel PÉCHEUL
Professeur à l’Université d’Angers
Résumé : L’article I-6 du Traité établissant une Constitution pour l’Europe
affirme la primauté de la Constitution et du droit de l’Union Européenne.
La jurisprudence de la Cour de Justice avait déjà posé ce principe, mais c’est
la première fois que celui-ci est inscrit dans un Traité qui se veut
Constitution. Les Constitutions nationales seront donc déclassées au rang de
normes secondes et subordonnées. Sans doute le Conseil constitutionnel français
entend-il fixer une limite à cette relégation pour les dispositions "
expresses " et " spécifiques " à la Constitution française. Mais à la première occasion, lors de confrontation de notre principe
de laïcité avec l’article II-70 du traité-constitution, le Conseil abandonne
son rôle de gardien de nos règles suprêmes au profit des juges européens. La
ratification du traité entraînera donc l’abrogation implicite de notre
Constitution et l’abdication du pouvoir souverain du peuple français.
La souveraineté comme principe d’imputation par Michel TROPER
Professeur à l’Université de Paris X
Membre de l’Institut Universitaire de France
Résumé : Quelle que soit la nature des règles auxquelles on doit obéir, il est
impossible de se passer d’un principe d’imputation de la souveraineté. C’est ce
qui permet notamment de comprendre et de justifier la nécessité de
l’obéissance. Dans nos démocraties occidentales, l’exercice du pouvoir n’est
légitime que s’il est imputé au peuple souverain. Cette idée n’est pas toujours
aisément applicable en droit interne, notamment en raison du contrôle de
constitutionnalité. Le problème devient tout à fait insoluble dans le contexte
de la construction européenne. Les décisions européennes ne peuvent pas être
imputées au peuple européen puisqu’il n’existe pas. Elles ne peuvent pas, non
plus, être imputées à la volonté du peuple français puisqu’elles prévalent sur
nos lois et qu’elles peuvent être adoptées contre la volonté de la France. Ainsi la souveraineté du peuple implique la légitimité de l’obéissance aux règles qui
émanent de lui et de ses représentants en droit interne. En droit européen,
c’est l’inverse : la légitimité du droit européen implique l’obéissance à des
règles décidées par des institutions qui ne représentent aucun peuple après que
l’on a demandé aux peuples souverains de désobéir à leur propre volonté
souveraine.
La nature juridique de la nouvelle Union européenne par Olivier GOHIN
Professeur à l’Université de Paris II
Résumé : Depuis son origine, la construction européenne s’est engagée dans une
perspective supranationale. Et la Cour de justice a ainsi qualifié le traité
instituant la Communauté économique européenne de " Charte
constitutionnelle de base ", dans son arrêt Les Verts c/ Parlement du 23
avril 1986. La mise en ¦uvre progressive d’un fédéralisme constitutionnaliste,
passe par un préalable : le nouveau traité est une véritable Constitution
dès lors qu’elle correspond à la définition matérielle de toute Constitution :
organisation des pouvoirs publics et garantie des libertés fondamentales, avec
identification d’un pouvoir constituant, formé par la somme de tous les
pouvoirs constituants dérivés des États membres, sans exception. Dès lors,
la question se pose de savoir si la nouvelle Union européenne, établie par
cette Constitution est un véritable État. Une telle qualification est à retenir
puisque la nouvelle Union européenne réunit, dès à présent, les éléments
nécessaires de définition de l’État qui sont au nombre de trois : le
territoire, le peuple, le pouvoir organisé avec prise en compte de l’élément
supplémentaire qui joue un rôle décisif dans cette définition : la souveraineté
au sens de la détention par l’Union de la souveraineté de compétences et,
accessoirement, du transfert à l’Union de nombre de compétences de
souveraineté.
La personnalité juridique de l’Union par François-Guilhem BERTRAND
Professeur émérite à l’Université de Paris XI
Résumé : La personnalité juridique de l’Union résulte de l’article I-7 du
Traité-Constitution. Cette disposition doit se lire avec l’arrêt du 31 mars
1971 de la Cour de Justice A.E.T.R. qui décide que la personnalité donnée à
l’Europe efface celle des Etats membres et leur interdit de se manifester
lorsque l’Europe s’exprime. Un des fondements du fédéralisme se trouve ainsi
posé de façon subreptice.
La place des Etats membres au sein de l’Union et dans le concert des Nations
par Michel CLAPIÉ
Professeur à l’Université de Montpellier I
Résumé : Le traité établissant une Constitution pour l’Europe opère une
véritable transmutation juridique de l’Union européenne. La nouvelle personne
juridique ainsi constituée bouleversera le rôle des Etats membres et affectera
gravement leur sort dans le concert des nations. Ainsi, le traité conduit
naturellement à la dépossession des Etats membres de leurs compétences
originelles et les soumet à l’implacable tutelle de l’Union sous le double
effet d’une emprise technocratique accrue et d’un véritable carcan idéologique.
Ils ne garderont de l’Etat que l’apparence et le nom. La ratification du
traité entraînera également la substitution de l’Union aux Etats membres sur la
scène internationale et leur subordination tant à l’OTAN qu’à l’Union en
matière de politique étrangère. De sorte que ratifier ce traité conduit bien à
dresser le constat de décès des Etats membres.
II. NOUVELLE UNION EUROPÉENNE ET DÉMOCRATIE
Séance sous la présidence du Recteur Armel PÉCHEUL
Les valeurs et objectifs de l’Union par Anne-Marie LE POURHIET
Professeur à l’Université de Rennes I
Résumé : Les valeurs et objectifs de l'union sont respectivement abordés aux
articles 2 et 3 de la première partie du traité constitutionnel et confirment l'avènement
du gouvernement des juges. Les valeurs sont simplement énumérées à la suite
sans aucun effort d'exposé philosophique ni de définition. Sous une apparence
classique les termes utilisés sont très équivoques et susceptibles
d'interprétations divergentes (dignité, égalité, tolérance par exemple) tandis
que l'introduction des "droits des personnes appartenant à des
minorités" dans les droits de l'homme constitue une provocante
contradiction. Les objectifs sont définis en termes filandreux sans fin et sans
fond et cette conception totalisante est d'une importance essentielle puisque
toutes les compétences de l'Union (principes d'attribution, de subsidiarité, de
proportionnalité et clause de flexibilité) sont précisément conditionnées par
la poursuite de ces objectifs.
Le déficit démocratique par Alain LAQUIÈZE
Professeur à l’Université d’Angers
Résumé : En dépit des objectifs fixés par la déclaration de Laeken de décembre
2001 qui a pu parler d’un défi démocratique auquel était confrontée l’Union européenne,
Le traité établissant une Constitution pour l’Europe, signé à Rome le 29
octobre 2004, n’y répond que très partiellement. Qu’il s’agisse de ses
conditions d’élaboration et de ratification, traduisant incontestablement une
méfiance envers les peuples des États membres qui ne sont, pour une majorité
d’entre eux, aucunement associés au processus, le traité comporte en outre peu
d’avancées notables, le droit d’initiative populaire et le renforcement du rôle
des parlements nationaux dans le fonctionnement de l’Union n’étant que les
témoignages d’une démocratisation symbolique. Si bien qu’au défi démocratique
lancé par le Conseil européen à Laeken, le traité constitutionnel ne répond que
par le déficit démocratique, phénomène récurrent de la construction européenne.
La Charte des droits fondamentaux contre les droits de l’homme
par Jean-Philippe FELDMAN
Professeur à l’Université de Vannes
Résumé : La Charte européenne des droits fondamentaux de l’Union, qui constitue
la seconde partie du traité établissant une Constitution pour l’Europe, ne
saurait satisfaire les défenseurs intransigeants des libertés. En la forme, ses
rédacteurs n’ont pas respecté leur mandat. Au fond, non seulement ont-ils
amoindri les droits-libertés, et notamment le droit de propriété, mais encore
ont-ils proclamé l’indivisibilité des valeurs de l’Union. Pour la première
fois dans un texte appelé à devenir obligatoire, une valeur identique est
attribuée aux droits-libertés et aux droits-créances. Loin de promouvoir les
droits de l’homme, la Charte risque de les affaiblir dangereusement.
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