Cercle
d'Etude de Réformes Féministes
Face aux obscurantismes (l'islamiste et les autres) : le Devoir de Liberté
FEMMES
CONTRE LES INTEGRISMES[1]
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pour les droits des femmes
29/08/03
" Les
droits fondamentaux des femmes et des fillettes font inaliénablement, intégralement
et indissociablement partie des droits universels de la personne. L'égale et
pleine participation des femmes à la vie politique, civile, économique,
sociale et culturelle, au niveau national, régional et international, et l'élimination
totale de toutes les formes de discrimination fondées sur le sexe sont des
objectifs prioritaires pour la communauté internationale "
Déclaration
de Vienne en préparation de la Conférence mondiale des femmes (Pékin 1995).
Femmes
contre les intégrismes (Fci) réaffirme et oeuvre pour le respect du principe
d’égalité de droit et de traitement entre les femmes et les hommes en France
comme de l’autre côté de la Méditerranée.
Dans
le préambule des Actes des premières Rencontres organisées par Fci en 1996,
nous écrivions : " les traditions patriarcales et les religions ont
mis en place l’oppression des femmes. Les pays qui institutionnalisent cette
oppression, en projetant les religions au sommet de l’Etat, excluent les
femmes des sphères politiques, économiques et sociales. Or un pays qui exclut
la moitié de sa population se condamne lui-même à la misère qui fait le
berceau des intégrismes ".
Depuis
des décennies, le sort des femmes dans les pays du Maghreb ne s'améliore pas,
bien au contraire ! Les forces intégristes ont pris de multiples visages et
utilisent tous les moyens -des plus insidieux aux plus violents- pour maintenir
la pression à l’encontre des femmes et renforcer leur hégémonie, via des
codes de la Famille moyen âgeux.
Ces codes peuvent êtres appliqués en France et dans d’autres pays
d’Europe, si bien que les femmes issues de l’immigration peuvent connaître
les mêmes discriminations que celles qui sont restées dans leur pays
d’origine.
En
Algérie, au Maroc, dans une certaine mesure en Tunisie et aussi en France, les
codes de statut personnel et les traditions d'un autre âge maintiennent les
femmes dans des situations de dépendance et de soumission ; les conditions
politiques, économiques et culturelles président encore au maintien inique de
ces codes. Les faits sont dramatiquement là : des divorces, des répudiations
surtout, -la répudiation étant
malheureusement assimilée à un divorce- laissant des épouses dans le dénuement,
sans logement ni ressource; des mariages polygamiques imposés par le mari, des
mères dont les enfants sont enlevés[2];
des jeunes filles séquestrées (françaises emmenées de force au bled avec une
alternative peu réjouissante "où tu l’épouses ou tu passes ta vie en
Algérie!"), privées de moyens de s’exprimer ; toutes obligatoirement
soumises à des pères, des frères, des époux ou des tuteurs parfois sans
scrupule (voire des mères, tant ces pratiques sont ancrées dans les esprits)
Ces
situations ont des conséquences désastreuses dans les domaines social, économique,
politique et culturel. Elles concernent les femmes vivant sur le pourtour de la
Méditerranée, bien sur en Algérie, au Maroc et en Tunisie mais aussi en
France et en Espagne à travers l’immigration.
Il y
a CONFRONTATION... de lois et de cultures.
Les
femmes sont les premières concernées et visées, parce qu’elles sont des
femmes !
Nous avons cherché les moyens de nous saisir concrètement de ces problèmes
: dans cette optique, nous avons réalisé le guide " Madame vous avez des
droits" (2è édition 2002 à 15.000 exemplaires).
Ce
guide expose à la fois les particularités discriminantes des statuts
personnels des femmes au Maghreb et décrit les recours possibles en France. Il
rappelle bien sûr les grands principes à l'œuvre dans les Conventions
internationales (Convention européennes des droits de l'homme, Convention de la
Haye, Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination
envers les femmes /CEDAW) tout en s'attachant à trouver des solutions précises
pour chaque situation concrète.
Aujourd'hui,
l'approfondissement du travail juridique mené par notre association permet de
faire un certain nombre de préconisations dans le cadre des conventions bilatérales
qui existent entre la France et les pays du Maghreb.
Ces
préconisations résultent autant du travail de recherche mené au sein de Fci
que de la connaissance des situations vécues par les femmes issues ou non de
l'immigration, et telles qu'elles sont exposées au cours des permanences
juridiques que propose Fijira (Femmes informations juridiques internationales en
Rhône-Alpes), structure de consultation et de réflexion sur ces questions.
Du point de vue des femmes
Les
questions qui se posent s’examinent aussi bien du point de vue des
discriminations faites aux femmes, que de l’absurdité et de l’inadéquation
d’appliquer des règles étrangères à des personnes durablement installées
en France
L’application
de la loi nationale : à géométrie variable
En
France, une jurisprudence ancienne impose l’application de leur loi nationale
aux étrangers résidant en France. Ce qui de prime abord pouvait s’entendre -
puisqu'en matière de statut personnel, on applique la loi française aux français
résidant à l’étranger- pose en fait de réelles difficultés. [3]
En
effet, si l’application de la loi nationale se révèle sans grande incidence
face à des législations semblables aux règles françaises, en revanche elle
pose de véritables difficultés face à des lois profondément dissemblables
aux nôtres et allant à l'encontre des principes de respect des droits humains.
Il en résulte des inégalités de traitement entre françaises et étrangères.
Dans
la pratique cependant, les juges sont loin d’appliquer systématiquement la règle
de la loi nationale.
Ils
appliquent en général la loi française quelle que soit la nationalité des
intéressés, et ce, par souci de simplicité ou parce qu’ils estiment
qu’elle offre des solutions plus acceptables…
La
jurisprudence et la loi ont également élaboré des exceptions : à titre
d’exemple, en cas de divorce ou de séparation de corps, c’est la loi française
qui s’applique en raison du domicile en France des époux (article 310 du code
civil). En matière de filiation, c’est là encore la loi française qui est
compétente quand l’enfant réside en France.
Il
paraît important de généraliser l’application de la loi du domicile en matière
de statut personnel des étranger-e-s pour celles et ceux qui sont installé-e-s
en France.
La
reconnaissance de jugements étrangers
Un
jugement étranger relatif à une question de droit de la famille est reconnu de
plein droit en France. La saisine du juge de l'exequatur permet de confirmer la
reconnaissance ou de rendre la décision exécutoire. Elle permet aussi de
refuser de reconnaître certains jugements étrangers qui pourraient être irréguliers.
On
sait que pour refuser l’application d’une loi étrangère en France le juge
opposera l’ordre public : c’est ce qu’il fera dans le cas d’une
demande de répudiation, par exemple. Cette attitude semble logique tant il est
évident que la répudiation, prérogative masculine des pays dits de droit
musulman, paraît discriminatoire et infamante à l’égard des femmes.
Pourtant
le juge français ne va pas jusqu’au bout de sa logique puisque, s’il refuse
de prononcer des répudiations en France, il n’est pas toujours aussi
intransigeant quand il s’agit de les reconnaître lorsqu’elles ont été
obtenues à l’étranger. On peut d’ailleurs s’inquiéter du fait que la
cour de Cassation ait apparemment abandonné le principe européen d’égalité
des époux au profit du respect d’un ordre public procédural et pécuniaire
qui minimise l’atteinte que peut porter, par principe,
la répudiation.
En
effet, dans sa décision du 3 juillet 2001, la 1ère chambre civile de la cour
de Cassation s’est abstenue de répondre au moyen invoquant la violation du
principe d’égalité des époux garanti par l’article 5 du protocole n° 7
à CEDH, lors d’une répudiation algérienne. Le juge s’est limité a
examiner si l’épouse avait été régulièrement avertie de la procédure et
si elle avait bénéficié d’une compensation financière.
Il
n’est évidemment pas question de refuser de reconnaître systématiquement en
France des jugements étrangers, mais on ne peut pas tolérer que les
juridictions françaises ne prennent pas une position ferme et éthiquement
acceptable sur la reconnaissance, en France, des répudiations.
La
situation de polygamie
La
situation de polygamie est interdite en France et réprimée pénalement quand
les intéressés sont français. Il est clair que l’interdiction ne suffit pas
puisque des femmes, notamment d’origine africaine, vivent en situation de co-épouses
en France de manière tout à fait illégale. L’absence de droit au séjour
pour ces femmes pousse leur mari à les laisser dans la clandestinité. Ils
n’ont aucun intérêt à ce qu’elles se manifestent d’autant plus
qu’eux-mêmes perdraient leur droit au séjour. Les autorités françaises, même
si elles ne mesurent pas l’ampleur du phénomène, sont conscientes de ce
problème. On ne peut que regretter qu’elles n'aient pas le désir de prendre
la question à bras-le-corps, dans le contexte de violences exercées sur les
femmes en France.
Il
s'agit là encore de faire en sorte que sur le territoire français, soit
respecté le principe d'égalité entre les sexes à toute personne résidant en
France.
Conventions
avec les pays du Maghreb : dépassées ou inopérantes.
On
constate depuis plusieurs années que les conventions avec les pays du Maghreb
sont inopérantes.
Avec
l'Algérie : il faut, par exemple, renégocier le champ d’application la
convention franco-algérienne relative aux enfants de couples mixtes séparés
du 21 juin 1988, l’élargir aux couples non-mixtes (voire aux enfants
naturels), et obtenir l’engagement des autorités algériennes que les termes
de la convention soient respectés, ce qui n’est aujourd’hui pas le cas. Le
Bureau d’Entraide Judiciaire dépendant du Ministère de la Justice éprouve
les plus grandes peines à faire appliquer la convention aux autorités algériennes.
Avec
la Tunisie : il est impératif de négocier avec les autorités tunisiennes
l’application effective de la convention franco-tunisienne du 18 mars 1982 à
l’entraide judiciaire en matière de droit de garde des enfants. Elle n’est
pas respectée et les délais sont intolérablement longs.
Avec
le Maroc enfin, il apparaît que certains articles de la convention
franco-marocaine sont dépassés, notamment celui exigeant l’application de la
loi marocaine pour un divorce de marocains résidant en France. De plus, elle
n’est pas appliquée par la partie marocaine quant à ses dispositions sur les
enlèvements d’enfants.
Françoise
Kayser, membre de Fci en collaboration avec Emmanuelle Massalve, juriste à
Fijira (Femmes informations juridiques internationales en Rhône-Alpes)
_____
Extraits
du rapport remis à Blandine Kriegel,
secrétaire
générale du Haut comité pour l'intégration (Hci) , au printemps 2003
Qu’est-ce
qu’un code de statut personnel ?
C’est
un texte juridique qui organise la vie familiale des femmes. Les codes de statut
personnel des pays sous lois musulmanes sont discriminatoires vis-à-vis des
femmes, les soumettant entièrement à la volonté de l’homme : elles ne
peuvent consentir seules au mariage, ne peuvent quasiment pas divorcer,
subissent la polygamie. Elles sont facilement déchues de l’autorité
parentale. En Algérie, au Maroc, en Tunisie,
depuis de nombreuses années, des militantes luttent pour l’abrogation de ces
Codes.
Leur
application en France
Citons
par exemple, le cas d’une femme de nationalité algérienne, mariée, et qui
vit en France. Elle ne travaille pas, son mari subvient aux besoins de la
famille, ils ont trois enfants et en 1999, suite à un conflit, ils se séparent
provisoirement. A la rentrée de septembre 1999, le mari ne réintègre pas le
domicile conjugal. Elle reçoit un jugement de divorce unilatéral demandé par
le mari et obtenu près du tribunal d’Alger en juillet 1999. Cette femme n’a
pas reçu de convocation, elle s’aperçoit à la lecture du jugement, qu’on
lui accorde une pension alimentaire d’entretien de 1000 dinars (100 francs)
par enfant et par an. Le mari a donc demandé le jugement en Algérie et il
l’a obtenu. Par le jeu de l’exequatur, il a obtenu que le jugement rendu en
Algérie soit appliqué en France.
Un
autre cas : celui d’une femme de 52 ans, de nationalité algérienne, qui
vit en France depuis trente ans. Son mari est sous le régime de la retraite,
ils ont trois grands enfants. Il va en Algérie régulièrement chaque été.
Suite à des conflits, le couple se sépare. La femme obtient un jugement de
contribution aux charges du mariage, jugement rendu en France qui condamne le
mari à payer 3800 francs par mois pour l’entretien et l’éducation des
enfants. Elle a demandé le divorce en France et l’a obtenu. Dans le même
temps, le mari se rend en Algérie, saisit le tribunal de Bejaïa et obtient en
cinq jours un jugement de divorce, applicable en France, qui lui est favorable,
jugement que le juge français est tenu de faire appliquer et qui se télescope
avec le jugement rendu en France, tout cela par le jeu des conventions bilatérales
entre la France et l’Algérie.
Plus
globalement …..
La
question qui se pose est la suivante : Est-ce la loi du pays d’origine ou
la loi du domicile qui doit s’appliquer ? Premier élément de réponse :
le temps. Quand cela fait longtemps que l’on vit dans un pays, les lois du
pays peuvent s’appliquer à votre situation, surtout lorsqu’il s’agit de
trouver les solutions les plus justes et les plus égalitaires. Il s’agit
alors de faire en sorte que les femmes qui vivent sur notre territoire, se
voient appliquer la loi dudit territoire et que « l’ordre public »
soit respecté en matière d’égalité de traitement entre les femmes et les
hommes. Nous sommes dans le champ du droit international privé (DIP). Or
aujourd’hui, ce droit est trop mal connu, trop peu utilisé.
Un
guide « Madame, vous avez des droits ! »
L’association
FCI a réalisé un outil pratique qui s’adresse aux femmes et aux personnes
qui les accompagnent face à des situations de conflit dans la sphère privée
(conjugale et familiale). Ce guide, intitulé « Madame, vous avez des
droits ! » peut, à un moment donné, aider à régler des problèmes
de divorce et leurs conséquences sur la garde des enfants, sur le logement, sur
les retraites ….. Ce guide est donc un outil pratique qui permet aux femmes
qui veulent défendre leurs droits de se saisir elles-mêmes de la situation et
de développer des solutions qui leur soient le plus favorables possible.
Le
relativisme culturel …
Au-delà
de la méconnaissance des outils juridiques, se pose la question du « relativisme
culturel » ici en France. Dans
des instances d’exequatur, certains juges déclarent que « Monsieur et
Madame », étant tous deux Algériens et même s’ils vivent en France
depuis longtemps, au nom de leur culture, la loi algérienne peut et doit
s’appliquer et leur juridiction peut être saisie. Le dossier est alors classé
sans suite. Ceci est parfois effectif pour les questions de divorce, de
violence, de gardes d’enfants, de logement, de mariage imposé, de polygamie
….. Or cet état de fait va à l’encontre de l’égalité de droits entre
femmes et hommes, inscrite dans la loi française.
Il
est inadmissible que le juge français renvoye ces affaires au nom de
l’appartenance culturelle des personnes. L’exemple le plus extrême est
celui des jeunes filles et des petites filles face à l’excision, toujours
pratiquée dans certains pays d’Afrique et importée en France. Au nom du
relativisme culturel, on a toléré durant un temps ces pratiques d'un autre âge,
barbares à l’encontre des femmes, alors qu'elles étaient combattues déjà
fermement sur le sol africain qui les a vu naître. Il a fallu un procès célèbre
et plusieurs condamnations pour que cessent -officiellement- ces pratiques en
France.
L’objectif
d’égalité entre femmes et hommes est universel et international et les
droits des femmes sont indivisibles. Dans la Conférence mondiale des femmes à
Pékin en 1995, tous les pays sont représentés, chacun avec son histoire, sa
culture, sa religion, ses traditions et l’on a pu constater qu’à travers
nos différentes origines, européennes, africaines, asiatiques, sud américaines,
maghrebines ….. nous défendons les mêmes droits à l’égalité, la dignité,
la liberté de disposer de soi même et à représenter l’universel, la
participation à la vie sociale, politique, économique, culturelle.
….et
le droit à la différence
Il
n’en reste pas moins que la question du relativisme culturel est complexe car
le « droit à la différence » peut être utilisé comme argument :
chaque individu a le droit de vivre dans la différence qui est liée à sa
culture, à son histoire, à ses origines et à sa personne. Mais au nom du
droit à la différence, il ne s’agit pas d’être laxiste.
Sur
ces questions du relativisme culturel, nous avons un travail en profondeur à
faire et c’est le propos de « Femmes contre les intégrismes ».
Qu’il s’agisse des intégristes musulmans, juifs ou chrétiens, tous savent
jouer de la « différence culturelle », quand cela les arrange, pour
faire avancer leurs idées. C’est l’utilisation politique de la religion qui
mène, à un moment donné, dans une volonté de conquête du pouvoir, à
l’instrumentalisation de ladite religion.
Les
intégrismes en France
En
France, certains mouvements pratiquent l’entrisme dans les institutions : ils
propagent de façon très insidieuse des idées issues du terreau intégriste
sous couvert de respect de la différence, de tolérance, de droit des cultures
à s’exprimer. En particulier, dans l’Education nationale, dans la justice,
dans les médias, dans la culture, se pratique une forme d’entrisme policé
auquel il faut prendre garde car c’est la porte ouverte à l’intégrisme et
aux inégalités entre hommes et femmes à l’intérieur des grandes
institutions.
Comment
faire face aux stratégies des intégristes partout dans le monde ? Ce sont
des réseaux organisés financièrement, militairement, politiquement. Quelle
vigilance peut-on avoir sur le droit à la différence, le respect des cultures
et des droits essentiels et fondamentaux, en particulier ceux des femmes ?
Nous
affirmons que l’égalité des droits entre hommes et femmes est l’un des éléments
fondateurs de la démocratie, et non pas un élément à traiter une fois réglé
un certain nombre d’autres questions.
_____
LA
QUESTION DU VOILE
Malgré
les innombrables débats qui ont secoué la société depuis l'apparition des
premiers voiles à l'école, cette question est restée sans réponses, mais non
sans interrogations et analyses de notre part à partir des situations vécues
ici ou là.
Plutôt
que de nous focaliser sur la question du port du voile, notre travail à Fci a
toujours été du côté du droit des femmes en lutte contre les intégrismes :
la question du "même droit républicain pour tous et toutes" primant,
être pour ou contre le voile ne changeait rien à l'affaire, nous a-t-il semblé
au départ. De plus, à l'intérieur de l'association, rien n'était moins évident
que d'adopter une position commune sur le port du voile : à l'image de la société
toute entière, nous sommes partagées sur cette question à laquelle le
politique n'a toujours pas apporté de réponse claire.
Peut-on
être contre le port du voile sur tout le territoire français, comme commencent
à le réclamer des associations, et en même temps être pour la liberté
d'expression ? Peut-on souhaiter l'exclusion systématique de celles qui le
portent au travail, à l'école ? Certainement pas? En même temps, peut-on légitimer
partout le port du voile, et ainsi mettre sous pression celles qui se battent
pour leur émancipation ?
Vécu
d'abord à Fci comme un faux problème, ou plutôt un problème mal posé, une
sorte de piège tendu par les intégristes à tous ceux qui se réclament des
"droits de l'homme", le voile n'est cependant pas qu'un leurre.
Comment
faire cesser les pressions sur les jeunes-filles de plus en plus nombreuses
selon nos sources (avocats, associations) à
qui on impose le voile ? Ou à celles qui se l'imposent, sur le chemin quotidien
qui les mène de la cité au collège, "pour être tranquilles" ?
"Si
on laisse ces jeunes filles porter le voile à l'école au nom de la tolérance
ou d'une pseudo-liberté, à quel titre refusera-t-on demain la burqa ?"
s'interroge la philosophe Elisabeth Badinter dans son dernier livre, Fausse
route.
Nous
avons assez décortiqué la question pour ne pas percevoir dans le hidjeb
(apparu dans les années 70 avec la montée de l'intégrisme islamique en Iran)
le nouvel étendard intégriste déployé sur la tête des femmes. Dernièrement,
au cours d'un débat à Vénissieux (Rhône), Juliette Minces, auteur de
"les Femmes et le Coran" le rappelait à Saïda Kadda, présidente de
Femmes Françaises musulmanes engagées : le hidjeb qu'elle porte a bien été véhiculé
par les intégristes musulmans, à commencer par les chiites iraniens.
On
sait bien comment ce signe religieux ostentatoire fonctionne symboliquement
comme élément d'appartenance à une "communauté" de membres de
confession musulmane croyants, forcément croyants…
Nos
amies, femmes démocrates d'Algérie et du Maroc, sont toujours très étonnées
de voir se développer en France un phénomène qui était plutôt en régression
dans leurs propres pays. A leurs côtés, les théologiens éclairés et les
plus grands chercheurs le répètent : l'Islam n'est pas incompatible avec la laïcité,
et la lecture du Coran passe obligatoirement par l'intelligence marquée par le
souci de son époque.
Malheureusement,
ceux-la ne sont guère entendus, alors que des prédicateurs comme Tariq Ramadan
font un "tabac" dans les banlieues avec des discours démagogiques. Du
coup, circulent les interprétations les plus réductrices du Coran, propres à
toutes les dérives fondamentalistes.
Après
le passage de Tariq Ramadan dans un quartier, de nombreuses jeunes-filles se
voilent…
Entre
le choix d'une servitude volontaire (les jeunes-filles dans les banlieues, pour
éviter quolibets et insultes, ou pour démontrer leur appartenance à Dieu),
celui d'une servitude imposée (des femmes et des jeunes-filles sont payées
pour le porter) et le port du fichu traditionnel kabyle, turc, sarahoui, etc.,
les réponses sont aussi divergentes que les attitudes face au port du voile.
Restant
convaincues, tout comme Soheib Bencheikh, grand mufti de Marseille, que
"c'est l'éducation qui protègera les filles mieux qu'un bout de
chiffon", nous sommes du côté de celles et de ceux qui restent persuadé-e-s
que la laïcité doit garantir à tous l'exercice de sa religion et de son
libre-arbitre. De plus en plus de voix s'élèvent, y compris chez les
intellectuels d'origine arabe, qui vont dans notre sens : le grand poète
Adonis, ou encore Abdelwahab Meddeb, Mohamed Arkoun et bien d'autres .
Les
intégristes de différents courants agitent la question du port du voile comme
un leurre pour humanistes naïfs ; et pendant ce temps, black-out sur les graves
problèmes que rencontrent en France les femmes issues de l'immigration maghrébine
et turque en particulier (mais pas seulement), black-out sur les clivages
produits par l'idéologie totalitaire inhérente à l'intégrisme islamique: séparation
entre filles et garçons, séparation entre croyants et non-croyants, séparation
et discrimination partout, dans la rue, à l'école, à la maison.
Or, de cette non-mixité et de ces discriminations proposées comme modèle de société par les idéologues de la nébuleuse intégriste, les femmes restent les premières victimes. C'est pourquoi nous continuons de lutter aux côtés de celles et ceux qui, dans les pays sous loi musulmane, luttent pour l'égalité des droits entre femmes et hommes. FCI
[1] FCI BP 0640 69239 Lyon Cedex 02 tel/fax : 04 78 29 21 89
[2]
Le vrai problème vient du fait qu'après un enlèvement par le père
(cas le plus classique au Maghreb et dans les pays du Moyen-Orient) les
autorités algériennes, marocaines, tunisiennes ou autres ne permettent pas
le retour de l'enfant en France, au détriment bien entendu de la mère et
en violation des conventions bilatérales signées avec la France. Une
femme, quelle que soit sa nationalité, dont l'enfant est enlevé vers un de
ces pays, par son père, à de grandes chances de ne plus
revoir sa mère à cause du père évidemment, mais surtout à cause
des autorités qui finalement, par leur attitude, favorisent les enlèvements
puisque ce dernier ne sera jamais inquiété)
[3]
L'article 3 alinéa 3 du code civil prévoit
que les lois (françaises) concernant l'état et la capacité des personnes
régissent les français, y compris ceux
résidant à l'étranger. Donc, en matière de statut personnel des
français, c'est toujours la loi française qui s'applique, où que se
trouvent les français en question. Cette jurisprudence a établi au fil du
temps une sorte de réciprocité souvent bancale : les étrangers vivant en
France peuvent de voir appliquer la loi de leur pays sur
le sol français.