Cercle d'Etude de Réformes Féministes

 

Face aux obscurantismes (l'islamiste et les autres) : le Devoir de Liberté

 

 

DROIT EUROPEEN

 

 

RAPPORTS ENTRE RELIGION ET ETATS EN "OCCIDENT"

 

AUX USA :

système libéral et pluraliste

 

EN EUROPE :

a) Eglise d'Etat :

Angleterre, Ecosse, Norvège, Grèce

b) Concordat ( accords avec les Eglises) ou régimes de "cultes reconnus" : régimes impliquant une forme ou une autre de financement public :

France jusqu'en 1905 et Alsace Lorraine : le "gallicanisme" a soustrait le roi de France à l'autorité du pape, et limité l'influence du pape sur le clergé français, Allemagne, Luxembourg, Pays bas, Italie, Espagne,  Suède, - Belgique

c) Séparation : France depuis 1905 sauf en Alsace Lorraine

 

 

 

LEGISLATIONS REPRIMANT LE BLASPHEME EN EUROPE [1]

 

Allemagne, § 166 du code pénal, Autriche, article 188 du code pénal, Danemark, article 140 du code pénal (1866), Suisse, article 261 du code pénal», Grèce, article 198 du code pénal, Irlande, (Defamation act. 1961, n° 40 , Islande, Italie, article 724 du code pénal, Luxembourg, § 144 du. code pénal, Pays-Bas, code pénal, loi du 3 mars 1881. II. Titre 5, Ordre public, art. 147, Portugal Art, 220 du code pénal : a Outrages aux convictions ou fonctions religieuses. Art. 233, outrage au culte religieux,

 

Le contenu du blasphème est défini dans les termes suivants :

-          une action : blasphème, insulte, dénigre, bafoue, raille, fait outrage, offense, ridiculise ou vilipende, exprime de manière blessante, se moque, expressions blasphématoires blessantes, raille publiquement ou offense autrui de manière basse, vile ou grossière pour motif de convictions ou de fonctions religieuses ...

-          visant :  le contenu des convictions religieuses ou philosophiques,  une Eglise ou toute autre communauté religieuse ou association philosophique, ses institutions ou ses coutumes, une personne ou un objet faisant l'objet de la vénération d'une Eglise ou communauté religieuse , doctrines de la foi ou cultes d'une communauté religieuse, Dieu, la Divinité, les symboles ou les personnes vénérées dans la religion de l'Etat, les objets d'un culte, les sentiments religieux, un acte de culte religieux ..

Les circonstances dans lesquels le blasphème devient punissable est le suivant :

-          dans des conditions de nature à provoquer une indignation légitime, d'une manière apte à troubler la paix publique, publiquement, soit dans les lieux destinés ou servant habituellement à son exercice, soit dans des cérémonies publiques de ce culte, diffuse, expose publiquement, promeut ou possède en réserve à des fins de publication, d'exposition publique ou de promotion..

 

 

COMMENTAIRE :

 

Selon le Pr Flauss : « Depuis quelques décennies, les réglementations de répression de la diffamation religieuse ont tendance à tomber en désuétude ou/et à ne plus être appliquées par les juridictions. De facto ces pays se rapprochent de la France et de la Belgique qui étaient les seuls Etats Européens à ne pas réprimer pénalement le blasphème. »

 

 


 

 

 

CONVENTION DE SAUVEGARDE
DES DROITS DE L'HOMME ET DES LIBERTÉS FONDAMENTALES

Rome, 4.XI.1950

 

Les gouvernements signataires, membres du Conseil de l'Europe,

.....Considérant la Déclaration universelle des Droits de l'Homme, proclamée par l'Assemblée générale des Nations Unies le 10 décembre 1948;

Considérant que cette déclaration tend à assurer la reconnaissance et l'application universelles et effectives des droits qui y sont énoncés; ....

Article 1 Obligation de respecter les droits de l'homme

Les Hautes Parties contractantes reconnaissent à toute personne relevant de leur juridiction les droits et libertés définis au titre I de la présente Convention :

Article 9 Liberté de pensée, de conscience et de religion

1 Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion ; ce droit implique la liberté de changer de religion ou de conviction, ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa conviction individuellement ou collectivement, en public ou en privé, par le culte, l'enseignement, les pratiques et l'accomplissement des rites.

2 La liberté de manifester sa religion ou ses convictions ne peut faire l'objet d'autres restrictions que celles qui, prévues par la loi, constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité publique, à la protection de l'ordre, de la santé ou de la morale publiques, ou à la protection des droits et libertés d'autrui.

Article 10 – Liberté d'expression

1 Toute personne a droit à la liberté d'expression. Ce droit comprend la liberté d'opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu'il puisse y avoir ingérence d'autorités publiques et sans considération de frontière. Le présent article n'empêche pas les Etats de soumettre les entreprises de radiodiffusion, de cinéma ou de télévision à un régime d'autorisations.

2 L'exercice de ces libertés comportant des devoirs et des responsabilités peut être soumis à certaines formalités, conditions, restrictions ou sanctions, prévues par la loi, qui constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à l'intégrité territoriale ou à la sûreté publique, à la défense de l'ordre et à la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale, à la protection de la réputation ou des droits d'autrui, pour empêcher la divulgation d'informations confidentielles ou pour garantir l'autorité et l'impartialité du pouvoir judiciaire.

Article 14  Interdiction de discrimination

La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente Convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation.

Article 17 Interdiction de l'abus de droit

Aucune des dispositions de la présente Convention ne peut être interprétée comme impliquant pour un Etat, un groupement ou un individu, un droit quelconque de se livrer à une activité ou d'accomplir un acte visant à la destruction des droits ou libertés reconnus dans la présente Convention ou à des limitations plus amples de ces droits et libertés que celles prévues à ladite Convention.

Article 18 – Limitation de l'usage des restrictions aux droits

Les restrictions qui, aux termes de la présente Convention, sont apportées auxdits droits et libertés ne peuvent être appliquées que dans le but pour lequel elles ont été prévues.

Article 19 – Institution de la Cour

Afin d'assurer le respect des engagements résultant pour les Hautes Parties contractantes de la présente Convention et de ses protocoles, il est institué une Cour européenne des Droits de l'Homme, ci-dessous nommée "la Cour". Elle fonctionne de façon permanente.

 

Le protocole n° 1 à cette Convention stipule: "l'état, dans l'exercice des fonctions qu'il assumera dans le domaine de l'éducation et de l'en­seignement, respectera le droit des parents d'assurer cette éducation et cet enseignement conformément à leurs con­victions religieuses et philosophiques".

 

 

 

 

 

 

JURISPRUDENCE DE LA COUR EUROPEENNE DES DROITS DE L'HOMME 

 

Voir l'article de Maître Corinne Lepage dans Proche-orient.info :

 

- La cour a déclaré irrecevable, le recours d'une étudiante turque contre une interdiction de porter le tchador à l'université (3-5-1993), en considérant que ce port pouvait être assimilé à une pression sur les étudiants, elle a aussi rejeté le recours d'une enseignante suisse se plaignant d'une interdiction de porter son foulard en classe (15-2-2001), elle a refusé l'argument selon lequel l'interdiction du foulard serait une discrimination sexuelle, étant donné qu'il empêcherait les femmes musulmane de pratiquer leur religion, et non les hommes.

 

- La Cour a admis la mise à la retraite d'un officier turc pour opinion islamistes (25-5-1993, 11-9-2001) et la dissolution d'un parti turc islamique (25-5-1998) : " l'Etat concerné peut raisonnablement empêcher la réalisation d'un tel projet politique, incompatible avec les normes de la convention avant qu'il ne soit mis en pratique par des actes concrets, risquant de compromettre la paix civile et le régime démocratique dans le pays 

 

- la Cour a reconnu à la grèce le droit d'interdire le prosélytisme (Témoins de Jéhovah arrêt Kokkinis) (voir ci dessous)

 

- la Cour a puni la "diffamation religieuse" (affaire Otto Preminger : voir ci dessous)

 

 

KOKKINAKIS v GREECE

ECtHR: European Court of Human Rights 25 May 1993 Greece

 

Kokkinakis (K) and his wife, Jehovah's Witnesses, were convicted of proselytism after having called at the home of a woman married to the cantor of the local Orthodox church and encouraged her to change her religion. The offence of proselytism covered attempts to intrude on the religious beliefs of others with the aim of undermining them and was the subject of a body of settled case law. K and his wife were sentenced to four months' imprisonment and fined, as well as having booklets which they had hoped to sell to the woman confiscated.  (...)

The Court held: (1) that, although the sentence interfered with the manifestation of K's religion or belief in order to protect the rights and freedoms of others, no attempt had been made to specify how K had attempted to convince the woman by improper means; (2) that, as K's conviction was not, therefore, justified by any pressing social need, there was a violation of Art 9 (...)

 

COMMENTAIRE

Le prosélytisme est possible, sauf en cas de moyens impropres

 

 

OTTO-PREMINGER-INSTITUT v AUSTRIA

ECtHR: European Court of Human Rights, Ser A No 295-A, 20 September 1994, Austria

 

a) résumé :

Otto-Preminger-Institut (O) was a private association whose activities included the running of a cinema. It advertised several showings of a film based on a play for which the author had been convicted of blasphemy in 1895. It was described as caricaturing the trivial imagery and absurdities of the Christian creed and as investigating the relationship between religious beliefs and worldly mechanisms of oppression. The film ridiculed Jesus Christ, the Virgin Mary and the God of the Christian, Islamic and Jewish religions.   (..) Criminal proceedings were instituted against O's manager at the request of a Catholic diocese for `disparaging religious doctrine'. The regional court granted an order seizing the film in May 1985 and the planned showings could not take place. (....)

The Court held: (...)  that, having regard to the fact that Catholicism was the religion of the overwhelming majority of Tyroleans, the authorities could not be regarded as having overstepped the margin of appreciation in seizing the film to ensure religious peace and to prevent some people feeling the object of unwarranted and offensive attacks on their religious beliefs; (...) that neither the seizure nor the forfeiture of the film was, therefore, a violation of Art 10.

 

b) extraits des arguments de la cour : alleged violation of article 10 (art. 10)

 

 As the Court pointed out in its judgment in the case of Kokkinakis v. Greece of 25 May 1993 (Series A no. 260-A, p. 17, para. 31), freedom of thought, conscience and religion, which is safeguarded under Article 9 (art. 9) of the Convention, is one of the foundations of a "democratic society" within the meaning of the Convention. It is, in its religious dimension, one of the most vital elements that go to make up the identity of believers and their conception of life.

 

Those who choose to exercise the freedom to manifest their religion, irrespective of whether they do so as members of a religious majority or a minority, cannot reasonably expect to be exempt from all criticism. They must tolerate and accept the denial by others of their religious beliefs and even the propagation by others of doctrines hostile to their faith. However, the manner in which religious beliefs and doctrines are opposed or denied is a matter which may engage the responsibility of the State, notably its responsibility to ensure the peaceful enjoyment of the right guaranteed under Article 9 (art. 9) to the holders of those beliefs and doctrines. Indeed, in extreme cases the effect of particular methods of opposing or denying religious beliefs can be such as to inhibit those who hold such beliefs from exercising their freedom to hold and express them.

 

In the Kokkinakis judgment the Court held, in the context of Article 9 (art. 9), that a State may legitimately consider it necessary to take measures aimed at repressing certain forms of conduct, including the imparting of information and ideas, judged incompatible with the respect for the freedom of thought, conscience and religion of others (ibid., p. 21, para. 48). The respect for the religious feelings of believers as guaranteed in Article 9 (art. 9) can legitimately be thought to have been violated by provocative portrayals of objects of religious veneration; and such portrayals can be regarded as malicious violation of the spirit of tolerance, which must also be a feature of democratic society. The Convention is to be read as a whole and therefore the interpretation and application of Article 10 (art. 10) in the present case must be in harmony with the logic of the Convention (see, mutatis mutandis, the Klass and Others v. Germany judgment of 6 September 1978, Series A no. 28, p. 31, para. 68).

 

The measures complained of were based on section 188 of the Austrian Penal Code, which is intended to suppress behaviour directed against objects of religious veneration that is likely to cause "justified indignation". It follows that their purpose was to protect the right of citizens not to be insulted in their religious feelings by the public expression of views of other persons. Considering also the terms in which the decisions of the Austrian courts were phrased, the Court accepts that the impugned measures pursued a legitimate aim under Article 10 para. 2 (art. 10-2), namely "the protection of the rights of others".

 

Whether the seizure and the forfeiture were "necessary in a democratic society" :

 

As the Court has consistently held, freedom of expression constitutes one of the essential foundations of a democratic society, one of the basic conditions for its progress and for the development of everyone. Subject to paragraph 2 of Article 10 (art. 10-2), it is applicable not only to "information" or "ideas" that are favourably received or regarded as inoffensive or as a matter of indifference, but also to those that shock, offend or disturb the State or any sector of the population. Such are the demands of that pluralism, tolerance and broadmindedness without which there is no "democratic society" (see, particularly, the Handyside v. the United Kingdom judgment of 7 December 1976, Series A no. 24, p. 23, para. 49).

 

However, as is borne out by the wording itself of Article 10 para. 2 (art. 10-2), whoever exercises the rights and freedoms enshrined in the first paragraph of that Article (art. 10-1) undertakes "duties and responsibilities". Amongst them - in the context of religious opinions and beliefs - may legitimately be included an obligation to avoid as far as possible expressions that are gratuitously offensive to others and thus an infringement of their rights, and which therefore do not contribute to any form of public debate capable of furthering progress in human affairs.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

COMMISSION EUROPÉENNE

Décision du 7-5-1982, l'affaire Gay News Ltd et Lemon c. le Royaume­Uni

 

 (la commission peut statuer sur des plaintes relatives à la violation du droit communautaire, dans lequel est inclu la convention de 1950, bien qu’elle n’émane pas de l’Union Européenne)

 

Le magazine Gay news avait publié texte évoquant Jésus mort subissant des actes sexuels et le décrivant comme homosexuel de son vivant.

« ... la Commission remarque d'abord que le fait d'ériger le blasphème en infraction pénale ne suscite en soi aucun doute quant à sa nécessité : si l'on admet que les sentiments religieux du citoyen méritent protection contre les attaques jugées indécentes sur des questions que l'intéressé estime sacrées, on peut alors également juger nécessaire, dans une société démocratique, de stipuler que ces attaques, lorsqu'elles atteignent une certaine gravité, constituent une infraction pénale dont la personne offensée peut saisir le juge. »

 

Décision du 5-3-1991 Affaire Choudoury c. Royaume uni

Une association musulmane demandait au Royaume Uni de punir Salman Rushdie pour blasphème.

La commission refusa d’admettre que l’article 9 ouvrait aux adeptes d’une religion un droit d’action au pénal contre ceux qui outrageaient ou insultaient leurs sentiments religieux.

 

Décision du 18-8-1997  Dubrowska et Skup

La commission admet qu’en vertu de l’article 9 de la convention, les Etats pouvaient être tenus de prendre des mesures pour éviter qu’un individu soit perturbé dans l’exercice de sa religion par les activités d’autrui attentatoires à ses sentiments de croyant.

 

 

 

COMMENTAIRE :

 

Nous souhaitons attirer l’attention des lectrices, et lecteurs, sur l’importance de l’innovation juridique et philosophique de ces arrêts. (voir les commentaires du traité de droit des religions et du Pr Flauss ci dessous).

 

La jurisprudence européenne ne se revient pas exactement à la notion traditionnelle du blasphème. Ce n’est pas au nom d’une allégeance envers un Dieu qu’elle accepte de donner effets à des textes qui relevait de l’ancienne soumission aux christianisme.

La jurisprudence européenne invente ici une dimension à l’intégrité de la personne. Ses « sentiments religieux », éléments de son « for intérieur ».  C’est au nom de la défense de l’intégrité psychique des personnes, conçue comme comprenant ses « sentiments religieux », que la justice européenne limite la liberté d’expression. A l’extrême, certaines attaques des religions pourraient « inhiber » l’esprit des « victimes » au point de les empêcher de croire. S’il s’agirait de distinguer les expressions utiles au débat de celles qui ne le sont pas.

 

Une autre conception de l’équilibre des libertés eu été possible, était, nous semble-t-il, celle de l’Europe des Lumières, issue des orateurs grecs. Celle qui prête à chaque adulte la capacité d’utiliser la liberté d’expression pour répondre aux attaques contre ses opinions et « sentiments ». Sans avoir besoin de recourir à la justice, sauf si il ou elle est victime de mensonges diffamatoires, ou d’atteintes à sa vie privée. Laissant les auditeurs libres de démêler ce qui est utile au débat et à leur propre réflexion, de ce qui ne l’est pas.

La justice européenne réduit l’ « homo-européanus » à une bien faible chose.  Mais maman europe est là, pour nous protéger des méchants qui vous disent de vilaines choses, ne pleurons plus.

 

La conception américaine ( voir l’arrêt Cantwell ci dessous) apparaît bien différente.

 

« Accessoirement » ou presque, l’arrêt Otto Preminger, justifié par le « heurt » des sentiments d’une religion majoritaire, paraît faire peu de cas du principe d’égalité. Toutes les législations punissant uniquement la « diffamation » des religions reconnues bafouent nécessairement ce principe puisqu’elles conduisent à une discrimination entre croyances, selon qu’elles seraient considérées ou non comme des religions, et parmi ces dernières, selon qu’elles sont considérées ou non comme de « vraies » religions.

 

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Pour les auteurs du Traité de droit des religions[2] La Cour juge qu'il est de la responsabilité de l'État « d'assurer à ceux qui professent croyances et doctrines la paisible jouissance du droit garanti par l'article 9 » car « dans des cas extrêmes le recours à des méthodes particulières d'opposition à des croyances religieuses ou de dénégation de celles-ci peut aboutir à dissuader ceux qui les ont d'exercer leur liberté, de les avoir et de les exprimer ». La surprotection de la liberté de religion apparaît justifiée par le fait qu'elle englobe non seulement des manifestations mais aussi, avec une intensité que n'atteignent pas les autres droits et libertés protégés par la Convention, le for interne du croyant. Dans l'affaire Wingrove, la Cour a d'ailleurs souligné qu'il appartient aux autorités de l'État de protéger « les personnes dont les sentiments et les convictions les plus profonds en seraient gravement offensés ».

 

Selon le Pr Flauss[3] « Se livrant à une lecture de l'article 10 de la Convention à la lumière de l'article 9, la Cour est amenée à considérer que la défense des sentiments religieux est couverte par la «protection des droits d'autrui ». Ce faisant, la Cour européenne opère une redéfinition des places respectives de la liberté d'expression et de la liberté de religion : elle consacre, dans le cadre de l'article 10(2), un droit à la protection des sentiments religieux qui n'est pas explicitement garanti par la Convention au titre de l'article 9. Une telle option a été vive­ment critiquée en ce qu'elle traduisait une dérive interprétative des articles 10 et 9 de la Convention. »

Il rappelle l’évolution de la jurisprudence de la commission européenne, et se demande, compte tenu de la progression au niveau international de l’idée d’une obligation de protection par les Etats, si dans l’affaire « Choudhury c. Royaume, la même réponse serait possible aujourd’hui...

 

 

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Questions simples et sans doute impies : 

Au vu de la jurisprudence relative au magazine Gaynews, qui ne représentait que des actes entre adultes, l’opinion que Mahomet consommant son mariage avec une fillette de neuf, la petite Aïcha, aurait été condamné aujourd’hui pour pédophilie, de même que les ayatollahs autorisant aujourd’hui, le « mariage » des filles dès cet âge, devraient être condamnés pour incitation à la pédophilie, seraient elles considérées comme blasphématoires ?

Un musulman qui condamnerait moralement les ayatollahs autorisant ces « mariages », devrait il être à son tour condamné pour avoir « heurté leurs sentiments religieux » ?

En fonction d’un devoir de l’Etat de protéger les sentiments religieux, les Etats ne devraient ils pas systématiquement poursuivre les auteurs de tels propos ?

 

 

 

CONVENTION-CADRE POUR LA PROTECTION DES MINORITES NATIONALES 10/11/1994

(non signée par la France)

 

Article 6

1 - Les Parties veilleront à promouvoir l'esprit de tolérance et le dialogue interculturel, ainsi qu'à prendre des mesures efficaces pour favoriser le respect et la compréhension mutuels et la coopération entre toutes les personnes vivant sur leur territoire, quelle que soit leur identité ethnique, culturelle, linguistique ou religieuse, notamment dans les domaines de l'éducation, de la culture et des médias.

2 - Les Parties s' engagent à prendre toutes mesures appropriées pour protéger les personnes qui pourraient être victimes de menaces ou d'actes de discrimination, d'hostilité ou de violence en raison de leur identité ethnique, culturelle, linguistique ou religieuse.

Article 7

Les Parties veilleront à assurer à toute personne appartenant à une minorité nationale le respect des droits à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d'association, à la liberté d'expression et à la liberté de pensée, de conscience et de religion.

Article 8

Les Parties s'engagent à reconnaître à toute personne appartenant à une minorité nationale le droit de manifester sa religion ou sa conviction, ainsi que le droit de créer des institutions religieuses, organisations et associations.

 

 

CHARTE DES DROITS FONDAMENTAUX DE L'UNION EUROPEENNE

 

Article 10

Liberté de pensée, de conscience et de religion

Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion. Ce droit implique la liberté de changer de religion ou de conviction, ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa conviction individuellement ou collectivement, en public ou en privé, par le culte, l'enseignement, les pratiques et l'accomplissement des rites.

 

 

DIRECTIVE 89/552/CEE DU CONSEIL DU 3 OCTOBRE 1989

visant à la coordination de certaines dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives à l'exercice d'activités de radiodiffusion télévisuelle

 

Article 12

La publicité télévisée ne doit pas: a) porter atteinte au respect de la dignité humaine; b) comporter de discrimination en raison de la race, du sexe ou de la nationalité; c) attenter à des convictions religieuses ou politiques; d) encourager des comportements préjudiciables à la santé ou à la sécurité; e) encourager des comportements préjudiciables à la protection de l'environnement.

 

DIRECTIVES EUROPEENNES CONCERNANT L'ABATTAGE RELIGIEUX

Plusieurs directives autorisent des dérogations aux règles d'abattage des animaux afin de permettre le respect des règles rituelles.

 

DIRECTIVE 2000/78/CE DU 27 NOVEMBRE 2000

Portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail; protège contre la discrimination religieuse entre autres.

 

 

JURISPRUDENCE DE LA COUR DE JUSTICE DES COMMUNAUTES EUROPEENNES

 

- jurisprudence favorable à un "accommodement raisonnable" en vue de prendre en compte les convictions religieuses des agents des institutions communautaires ( arrêt  27-10-76)

 

 

 

 



[1]  Source : La diffamation religieuse article dans l'ouvrage collectif "La protection internationale de la liberté religieuse"  Publications de l'institut René Cassin Bruylant 2002 Bruxelles

 

[2]  Jurisclasseur, Litec 2003

[3]  La diffamation religieuse article dans l'ouvrage collectif "La protection internationale de la liberté religieuse"  Publications de l'institut René Cassin Bruylant 2002 Bruxelles