Cercle
d'Etude de Réformes Féministes
Face aux obscurantismes (l'islamiste et les autres) : le Devoir de Liberté
JULIETTE
MINCES ET MANSOUR FAHMI
DEUX
SOCIOLOGUES FEMINISTES
L’une
est notre contemporaine et concitoyenne.
L’autre
est un égyptien qui rédigea en 1913 sous la direction de Lévy-Bruhl, une thèse
sur les femmes.
Le
rapprochement des deux auteures rappelle bien tristement
« le progrès du recul » …
JULIETTE MINCES
Juliette Minces est anthropologue, elle a consacré trois livre aux femmes des pays arabes :
- La femme dans le monde arabe en 1980
- La femme voilée, l’islam au féminin en 1990 [1]
- La
femme et le coran 1996[2]
Dans « la femme voilée », un livre qui ‘est avant tout le produit d’observations sur le terrain pendant près de dix ans de séjours et de voyages dans le monde musulman. », sa description des « formes quotidiennes de l’oppression » est très frappante, même si elle la nuance en précisant que « toute généralisation dans la description …de comportements ou de modes de pensée serait abusive ».
L’ « oppression » et la violence de l’homme d’abord :
« Le père relaie les femmes pour inculquer au jeune garçon les « valeurs » masculines .. valeurs hypertrophiées. « Survaloriser la virilité [ du petit garçon ] et la virilité général, entraîne chez lui une « obligation de machisme » …s’il ne se conforme pas à l’image de l’homme viril que la société lui renvoie et attend de lui, il est aussitôt déprécié, dévalué, moqué. En ce sens on peut également parler d’oppression de l’homme. »
« Dans la tradition islamique, l’homme «véritable » a une vie sexuelle importante, ou du moins se comporte comme s’il en était ainsi….Avec une femme n’appartenant pas à la famille, l’homme conçoit difficilement des relations autres que sexuelles (son éducation l’en empêche). Une femme étrangère à la famille ne peut être qu’une proie. Cette attitude devient réflexe, malgré la répulsion que lui inspire par ailleurs la femme, être impur par excellence, avec ses menstrues et son sexe porteur de souillure. Les prescriptions religieuses ( ablutions après l’amour …) renforcent en la justifiant cette répulsion ».
Société où l’obsession sexuelle reste chronique, même lorsque la sexualité est assouvie, car les femmes de la famille (hormis l’épouse) sont interdites, et les autres cachées. A la frustration psychologique s’ajoute celle que l’on pourrait appeler « psycho-visuelle », née de l’enfermement des femmes : on ne les voit pas, sauf voilées. »
« L’enfermement des femmes, sans exutoires possibles pour les hommes .. a produit des sociétés malades, dès que le système traditionnel a été atteint. »
« La femme subit la domination tant physique que psychologique de son mari. Il est la plupart du temps extrêmement violent à son égard, se vengeant sur elle de toutes ses frustrations extérieures. »
L’avilissement de la femme :
« L’un des atouts [de la femme] consiste en la manipulation de sa sexualité de l’homme. Elle .. se fera discrètement désirable par des provocations subtiles mais toujours détournées .. ou à l’inverse se refusera à lui.. Elle mettra en cause sa virilité en cherchant à le rendre incapable de tout acte sexuel pour le déprécier… Cette société a produit une mentalité particulière chez les femmes, celle que l’on rencontre chez tous les êtres assujettis. L’hypocrisie, le mensonge, la duplicité sont les seules armes dont en fin de compte elles disposent. Et beaucoup d’entre elles en usent. Chez les plus riches, qui ne travaillent pas, il faut ajouter l’arrogance, la paresse, la vanité… Dans le cadre des rapports tels qu’ils ont été définis par le système, il n’y a pas d’autre comportement possible, puisque l’affrontement brutal est suicidaire. Ce comportement devient à ce point une seconde nature que même parmi les femmes les moins assujetties,on le retrouve fréquemment dès qu’elles se croient en compétition. A cet égard, les femmes musulmanes sont souvent de grandes tacticiennes. »
Elle rappelle aussi, que la plupart de ceux qui excisent leurs filles, le font en croyant ( à tort) que c’est une prescription coranique.
Abordant le sujet des femmes dans l’immigration, elle souligne l’évolution de la pensée des femmes, et l’encouragement qu’elle apporte à leurs filles :
« au fil des ans, les mères acquièrent de l’ambition pour leurs filles… Le regard que les mères ont fini par porter sur leur propre vie amène certaines d’entre elles à souhaiter « autre chose » pour leurs filles et à s’en faire jusqu’à un certain point, les complices. Le mariage et la procréation continuent à conserver leur importance dans la vie d’une femme. Mais il n’est pas rare qu’une mère, au détour d’une conversation, conseille à ses filles d’éviter d’avoir trop d’enfants. »
Elle dénonce (dès 1990) : « les tentatives parfois réussies d’implantation des fondamentalistes auprès des musulmans immigrés en Europe… Ils mènent des actions extrêmement habiles et efficaces auprès des populations souvent démunies et pauvres… Ces groupuscules chez qui l’argent ne manque pas, s’organisent pour combler les brèches que les Etats d’accueil ont laissé se développer, aider à une reprise en main des jeunes par une action sociale efficace, un encadrement et un enseignement de l’ « islam » rassurant. »
Concernant le voile, elle explique :
Le voile est le « symbole de l’enfermement des femmes » « la marque de la conception que les hommes ont des femmes » « il les réduit en objets sexuels, inférieurs, impurs et dangereux » conception reflétée par nombre de textes religieux.
« De nombreuses sociétés ont voilé leurs femmes… Dans le monde chrétien, les femmes ont pu, peu à peu, abandonner cette protection, en même temps que les hommes, dans leur majorité, modifiaient leur comportement à leur égard…Hommes et femmes prirent l’habitude de se côtoyer, de se rencontrer, de se parler, et les premiers cessèrent de se comporter en chasseurs face à une proie méprisée. » « La plupart des pays musulmans ne connurent pas une telle évolution des mœurs .. » parce que « le voile est demeuré un enjeu politique. »
Dans « Le Coran et les femmes », elle ajoute, à propos de l’utilisation du voile par les islamistes, que ceux-ci « cherchent à obliger l’ensemble de la population ..à respecter tous les signes extérieurs de l’adhésion à l’islam. A la limite peu importe l’authenticité de la foi des individus pourvu que ceux-ci fassent la démonstration de leur appartenance. De là l’importance accordée aux vêtements et au maquillage des femmes. » « Pour l’islamisme radical, il en va comme si ce survêtement symbolisait à lui seul le Coran tout entier ».
Elle rappelle que l’enjeu de l’émancipation des femmes avait été clairement énoncé dès 1899 par l’égyptien « Kassem Amin (1863-1908) dans un essai intitulé « la libération de la femme » : « le progrès des nations est déterminé partout par des facteurs différents et variés dont le plus important est le progrès de la femme ; et leur décadence naît aussi de facteurs différents et variés dont le plus important est la décadence de la femme. Cette déchéance de la femme est, chez nous, l’obstacle majeur à notre marche vers le bien-être. Aussi, l’éducation de la femme n’est elle pas un luxe qu’on peut renvoyer à plus tard – comme l’imaginent ceux qui vantent bruyamment les vertus de l’éducation des garçons pour la préférer à celle des filles, - mais un besoin, voir une nécessité primordiale pour laquelle il faut tout mettre en œuvre. ».
Elle cite aussi la réplique cinglante et drôle de cet homme à ceux qui veulent imposer le voile « Pourquoi ne demande-t-on pas aux hommes de porter le voile ou de dérober leur visage au regard des femmes qu’ils craignent tant de séduire ? La volonté des hommes est elle inférieure à celle des femmes ? »
Après une analyse détaillée des règles du Coran, elle récapitule les passages du Coran relatifs aux femmes (traduction Kazimirsky) notamment les suivants :
Sourate II 228 « la génisse » : « .. les maris sont supérieurs à leurs femmes »
Sourate IV 38 « les femmes » : « Les hommes sont supérieurs aux femmes à cause des qualités par lesquelles Dieu a élevé ceux là au dessus de celles-ci et parce que les hommes emploient leurs biens pour doter les femmes.
Les femmes vertueuses sont obéissantes et soumises ; elles conservent soigneusement pendant l’absence de leurs maris ce que Dieu a ordonné de conserver intact. Vous réprimanderez celles dont vous avez à craindre l’inobéissance ! vous les reléguerez-les dans des lits à part, vous les battrez ; mais aussitôt qu’elles vous obéissent, ne leur cherchez point querelle. Dieu est élevé et grand »
Elle propose les thèses suivantes.
Elle rappelle la thèse essentielle de Mansour Fahmi : « Mahomet eut beau vouloir relever,en théorie, la condition du sexe dont les charmes ont agit si profondément sur sa sensibilité poétique, en dépit de ses intentions, l’islam les dégrada. Il les a protégées contre l’agression de l’homme, mais il les a étouffées en rendant difficile l’échange entre elles et la société qui les entoure, et par là, il leur a ôté les moyens mêmes de profiter de cette protection ».
Pour elle : « La hiérarchie basée sur le sexe est à l’origine de la dégradation du statut des femmes…Toute affirmation de l’infériorité d’un groupe entraîne sa discrimination, sa marginalisation, puis le mépris envers lui. Tout mépris doit ensuite, par une certaine « rationalisation », trouver à se justifier . C’est ainsi que la femme a été peu à peu diabolisée, renvoyée à la nature.. et à son impureté.
Elle explique qu’ « à partir du moment où dans le mariage, l’homme devient le centre et la filiation agnatique la seule reconnue, le droit des femmes à la sexualité et à leur descendance doit leur être confisqué, car le corps de la femme et sa progéniture appartiennent désormais au mari. Le mieux est de supprimer toute possibilité pour une femme de rencontrer d’autres hommes » ..« ce système a une véritable cohérence .. pour qu’il fonctionne il faut que la femme soit infériorisée, recluse, voilée », ainsi, « toutes les stipulations concernant le mariage et sa dissolution, même si elles étaient conçues à l’origine pour protéger les femmes, n’ont fait que renforcer leur dépendance ».
Juliette Minces dénonce le sophisme des islamistes « La plupart des théoriciens détourne le débat .. lorsque l’on fait référence aux versets qui affirment la prééminence des hommes sur les femmes, ils répliquent par ceux qui mettent en avant l’égalité devant dieu entre croyants et croyantes… Ainsi refusent ils de reconnaître que le Coran a renforcé, parce qu’il en a fait une loi, le rapport de domination des hommes sur les femmes. ».
Pour Juliette Minces « Toute religion est ce qu’en font ses adeptes », et elle estime que « ce n’est pas l’islam tel qu’il est pratiqué en général qui est dangereux » et que l’« on peut...comme pour toutes les religions envisager un islam moderne si l’on ne s’attache qu’à ses aspects spirituels et si l’on accepte de reconnaître que la relation hommes-femmes prescrite par le Coran est le produit d’une époque révolue ».
Hélas, là où « la séparation des sexes et le contrôle sur les femmes ont créé des société de haine réciproque, où les mères éduquent leurs filles dans la haine des hommes, et leurs garçons dans la peur de la femme. » Juliette Minces estime aussi que « dans les pays musulmans, la haine et le refus de l’occident, qui pourraient se comprendre après toutes les humiliations infligées depuis des siècles, sont surtout développés pour ce qu’il peut avoir de plus positif : l’esprit critique, la laïcité, la démocratie, le respect de l’autre.. l’égalité de droit entre hommes et femmes. »
Elle réprouve aussi l’attitude des grandes puissances, et tout particulièrement les USA, qui face à l’islamisme, « ne sont pas trop regardants quand les droits de l’homme ..sont bafoués, pourvu que leurs intérêts nationaux soient préservés [dans les Etats islamistes]. .Quand les femmes en sont les victimes, le silence est encore plus général : ce sont les « ‘coutumes » qui sont en cause, non le despotisme des dirigeants ou le fanatisme des groupes islamistes. La revendication d’égalité devant la loi entre les homes et les femmes, le désir de justice et de liberté, tout ce qui fonde nos valeurs et s’est révélé universel, est soudain mis sous le boisseau au nom du respect du droit à la différence. »
Dans
« Respublica » n° 197 en 2003, Juliette explique la stratégie
islamiste du voile en France :
Le
voile à l'école est le premier élément d'une stratégie qui consiste à
imposer par une forme de chantage d'abord sur l'école, ensuite ce sera sur
toutes les institutions françaises le "respect" des principes
islamistes. Je ne dis pas musulmans.
Lorsque
l'école refuse les "porteuses de voiles", celles-ci sont immédiatement
présentées comme les victimes de la laïcité française, tant par les
organisations islamistes radicales que par certains journalistes qui
indirectement les soutiennent. L'introduction soudaine du voile à l'école et
sa multiplication -même si ces jeunes filles ne sont pas majoritaires - n'est
pas le produit de la "re islamisation" des personnes de culture
musulmane mais la réaction de personnes qui se sont laissé prendre à l'idéologie
de l'islamisme radical dont les prêcheurs ont efficacement encadré ces
populations.
L'objectif,
en utilisant l'école comme premier lieu de test, est de paralyser toute réaction
à cette idéologie ("on ne peut exclure de l'école des jeunes filles à
cause d'un morceau de chiffon" ou encore "elles sont à un âge où la
recherche de leur identité est importante", ou encore "elles sont,
les pauvres, contraintes par leurs familles"; ou encore chez certaines
"féministes" : "ce sont encore les filles qui vont être pénalisées",
etc) .
Cela
permet de jouer à fond sur la victimisation, d'abord de ces jeunes filles
ensuite de l'ensemble des Français ou des étrangers de culture musulmane,
(sans d'ailleurs que nous cherchions à savoir ce que ces derniers en pensent,
car ils s'expriment peu ) et de prouver ainsi que la société française
serait toute entière islamophobe ou arabophobe. Toute réaction un peu ferme à
de tels arguments ou à d'autres liés au développement de l'antisémitisme
actif et verbal dans certaines écoles au nom d'un soutien inconditionnel aux
Palestiniens, est tout de suite interprétée de la même façon. On assiste
ainsi à l'élaboration d'une nouvelle forme de terrorisme de la pensée que
beaucoup de nos "intellectuels" ne veulent pas reconnaître. Il est
donc urgent d'agir et de légiférer. »